Intérieur Jour - un bureau en open space, les employés sont regroupés pour un pot en célébration d'un rendu: ''Lui: Qu'est-ce tu fais pour les vacances? Moi: Je vais à Chypre Lui: Avec qui? Moi: Avec mon copain (petite pause silencieuse) Lui: Euh... ton copain copain, ou un ami? Moi: Ben mon copain copain, sinon, j'aurais dit un ami. (nouvelle petite pause silencieuse) Lui: Ah, je savais pas... enfin, ça se voit pas du tout Moi: C'est vrai que je ne porte jamais mes plumes au bureau Lui: Ah, non, c'est pas ce que je voulais dire... Moi: Comment veux tu que ce soit visible alors? (long silence) Lui: euh je ne sais pas... tu as peut-être raison''
J'ai la chance de travailler avec des gens qui pour la plupart ne réagissent pas quand je parle de ma vie privée. C'est une des rares occasion que j'ai en tête d'une quelconque réaction, et franchement, ça n'a jamais altéré mes relations avec la personne en question. Je sais que c'est une chance, et je n'en abuse pas... je me suis toujours gardé de parler trop ouvertement de ma vie privée à mes supérieurs, mais il faut avouer qu'ils font de même. C'est pourquoi j'ai été surpris de lire dans le compte-rendu des réunions avec les délégués du personnel, que l'accord d'une journée de congé payé pour célébration de PACS avait été refusée parce que "ça ne concerne que les homosexuels", que les délégués auraient répondu "ce n'est pas vrai' (au lieu de dire "quand bien même"), et que la raison finale était "c'est un contrat entre personnes, et aucune célébration n'est requise, c'est une dépense qui n'est aujourd'hui pas prévue dans le budget de l'entreprise".
Ces propos découlent directement de la loi qui n'accorde effectivement aucun jour de congé pour un PACS alors qu'elle en accorde pour le mariage. Tant que la discrimination institutionnelle existe, je ne pense pas qu'on pourra aller plus loin dans la lutte contre l'homophobie. A mon sens il ne sert à rien de pénaliser des propos, de rajouter des clauses aggravantes à des crimes de haine, tant que la loi elle-même ne montre pas l'exemple.
Récemment, le génialement mélo Milk, illustrait le mieux cette lutte à l'américaine calquée sur le Civil Rights Movements. C'est sûrement en arrêtant d'interdire aux homosexuels de se marier, ou d'adopter en tant que couple, que l'Etat luttera le mieux contre l'homophobie. Et c'est sûrement en incluant des textes d'amour de toute nature au programme que le Ministère de l'Education Nationale luttera aussi le mieux contre l'homophobie...
Aujourd'hui, que ce soit au Liban ou en France, en tant qu'homosexuel je ne revendique aucun droit spécifique. Je demande juste qu'on me rende les miens.
Cette intervention répond (tardivement) à un appel trouvé ici, à l'occasion d'une énième tartufferie mondiale (la journée mondiale contre l'homophobie).
4 réactions
1 De Michel - 18/05/2009, 04:31
Ah, j'aime bien les posts qui sortent du thème "art & spectacle", je me sens plus à-même de laisser un commentaire..
En ce qui concerne celui-ci, ce qui me plait encore plus, c'est ton petit côté militant.
Mais bon, je voulais aussi venir en aide à ton collègue qui t'a permis de mettre en valeur ton sens de la répartie "je n'amène pas mes plumes au bureau". (oui, cela m'a fait beaucoup rire)
Tu aurais pu l'aider au lieu de le laisser mariner dans son embarras: un homosexuel, ça "se voit" parce qu'il est en général efféminé. Ce n'est évidemment qu'un préjugé (qui plus est subjectif), mais un préjugé qui trouve sa justification dans les statistiques: beaucoup de mes connaissances homos sont effeminées et la plupart de mes connaissances efféminées sont homos. Ce critère n'est évidemment pas scientifique, puisqu'il peut tout à fait amener à découvrir de faux positifs ou l'inverse..
Après, il y a toute une liste de signes extérieurs d'homosexualité (comme les cravates rainbow, les T-shirt Elton John, le porte-clés WHAM ou la sonnerie de portable Mylène Farmer)..
Mais en gros, de la même manière que je suis nul pour repérer les homos, j'en connais qui se vantent de pouvoir "le sentir"..
Bref, un doute m'étreint: n'aurait-on pas déjà eu cette conversation??
allez, je vous fais des gros bisous, à tous les 2, j'ajoute que je trouve ça pourri qu'on ne donne pas de congé pour un PACS dans votre entreprise, et je t'informe que tu as raté l'anniversaire de Rafi!
2 De aligateau - 18/05/2009, 10:49
et toi celui de m-a!
bises!
3 De MA - 19/05/2009, 14:02
Alors comme moi je suis, plus éventail que plumes, je voulais juste préciser que mon anniversaire est le 8 avril...concernant l'année comme tous les amis d'aligateau sont des gentlemen, et, bien sur toutes ses amies des ladies il est évident qu'il est inutile de la préciser .. mais comme il y a aussi quelques mauvais esprits, parmi eux, je rassure tout le monde en disant que contrairement à Dalida je n'ai pas connu le sphinx moi! non mais;
affaire d'éventail of course, olè!
4 De vesolt - 25/05/2009, 22:36
"La société, contre la nature même de l'amour, le conçoit comme une union stable, destinée à produire des enfants. Elle l'identifie avec le mariage. Toute transgression de cette règle est punie par une sanction dont la sévérité varie en fonction de l'époque et du lieu. (...) La protection du mariage pourrait se justifier si la société permettait un choix véritable. Comme il n'en est rien, il faut bien conclure que le mariage n'est pas la plus haute réalisation de l'amour mais une forme juridique, sociale, économique, dont les buts sont distincts de ceux de l'amour. La stabilité de la famille dépend du mariage, qui devient ainsi une simple projection de la société, sans autre objet que la reproduction de cette société. De là, la nature profondément conservatrice du mariage. L'attaquer, c'est dissoudre les fondements mêmes de la société. C'est pourquoi aussi, l'amour est un acte antisocial car chaque fois qu'il atteint sa réalisation, il ruine le mariage et le transforme en ce que la société ne veut pas qu'il soit : la révélation de deux solitudes qui créent par elles-mêmes un monde opposé au mensonge social, suppriment temps et travail et déclarent se suffire à elles-mêmes. Il n'est pas étonnant que la société poursuive avec la même animosité l'amour et la poésie qui témoigne pour lui, et qu'elle les condamne à la clandestinité, au monde sombre et confus de l'interdit, du ridicule, de l'anormal."
Octavio Paz (extrait du Labyrinthe de la solitude)